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Misophonie : que faire contre les sons qui rendent “dingue” ?

Pour la moitié des Français, le bruit est la nuisance numéro 1. Pour les misophones, il se transforme carrément en handicap… 

Cette phobie auditive dont témoigne à sa façon le comédien et humoriste Bruno Salomone dans son premier roman, "Les Misophones" (1), affecterait 15 % de la population. Dans un silence assourdissant... Le Club Solutions Santé Nature vous fait découvrir cette "haine des sons" et les rares solutions pour en atténuer les effets secondaires, handicapants au quotidien.

Comme chaque matin, Damien entre dans son bistrot favori pour prendre son petit-déjeuner. Et comme chaque matin, il observe, en connaisseur, le serveur Alexis, qu'il voit se tendre dès qu'il s'apprête à croquer dans sa tartine de pain grillé. Comme Damien, Alexis est misophone, et ce craquement matutinal a le don de le rendre très nerveux. Damien et Alexis sont deux des personnages du premier roman de Bruno Salomone, humoriste rendu célèbre par son rôle de Denis Bouley dans la série de France 2, "Fais pas ci, fais pas ça". Lui-même est misophone déclaré depuis ses 10 ans. "Dès que quelqu'un mastiquait, ça m'agaçait, ça m'irritait et je bloquais dessus, je regardais sa bouche, a-t-il confié à Europe 1. Depuis, un paquet de bruits me dérange, dont certaines respirations."

Nous y sommes : les misophones ne supportent pas ou très mal les bruits que font les autres en leur présence. Mastication et respirations en tout genre, mais aussi le simple fait de croquer dans une pomme ou une carotte, de manger des chips ou une même une banane, d'aspirer un liquide à la paille, de renifler ou de se racler la gorge sans cesse, le tintement des glaçons dans un verre, le cliquetis de la souris d'ordinateur ou les tapotements sur le clavier, des articulations qui craquent, des dents qui claquent, et ceteraaaaaaa !

Une haine de certains sons

Aux Etats-Unis, où cette phobie a été identifiée au début des années 2000 par un certain docteur Pawel J. Jastrebroff de l'université d'Atlanta puis recensée parmi les pathologies auditives par le neuroscientifique Aage R. Moller dans son "Textbook of Tinnitus", les spécialistes la nomment SSSS, Syndrome de sensibilité à des sons sélectionnés, en français dans le texte.

La misophonie ou haine des sons ("miso" : haine en grec, "phono" : son) commence le plus souvent dans l'enfance et ne cesse de s'amplifier : de plus en plus de bruits s'ajoutent à la liste des misophones au fil des années.

Avec des symptômes de plus en plus intenses et donc gênants : après la seule « émotion » des débuts, se déclarent une accélération du rythme cardiaque, une transpiration soudaine, une tension des muscles voire un "comportement déviant envers l'objet ou la personne source du bruit", qui peut confiner à de violentes colères.

Problème auditif ou trouble psychologique ?

Près de deux décennies après la découverte de cette pathologie, les chercheurs en savent encore peu sur l'origine de ces troubles. Jastrebroff évoque une mauvaise connexion de différents composants du système nerveux, corroborée par les travaux de l'Américaine Judith T. Krauthamer, qui émettent l'hypothèse de dysfonctionnements dans les Cortex cingulaire antérieur et insulaire, deux zones du cerveau également impliquées dans le syndrome de Gilles de la Tourette. D'autres études mettent l'accent sur une anomalie du système nerveux central. Aage R. Moller, lui, plutôt que dans des problèmes auditifs, affirme que la source de la misophonie serait à chercher dans des troubles psychologiques. Le neuroscientifique affirme d'ailleurs qu'elle s'accompagne souvent d'anxiété voire de troubles obsessionnels compulsifs.

Thérapies non médicamenteuses au secours des misophones

Le diagnostic de la misophonie restant aléatoire, il n'existe pas vraiment de traitement efficace à tous les coups.

Le docteur Jastebroff suggère d'écouter les sons qui posent problème en les associant à d'autres plus agréables et capables de détourner l'attention du misophone, comme de la musique par exemple. Hélas, ce traitement ne produirait ses premiers effets qu'après neuf mois de pratique !

Judith Krauthamer recommande de reproduire soi-même le son qui irrite, pour faire baisser l'hostilité qu'il provoque contre son auteur. Bref de faire le même "slurp" que votre voisin de table ou de bureau en buvant un soda...

Certains thérapeutes mélangent des techniques souvent évoquées ici - désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires (EMDR), méthode Tipi, cohérence cardiaque, hypnose, etc - qui permettent d'obtenir de bons résultats si le patient s'implique à fond dans sa thérapie.

En désespoir de cause, vous pouvez aussi choisir de vous isoler à l'aide de bouchons ou d'un casque anti-bruit ! Ni très seyant ni très sociable...

Ou comme Bruno Salomone d'en parler pour relativiser au maximum sa misophonie. "Aujourd'hui mes proches sont tous au courant. Et maintenant qu'ils ont lu le livre, ils ont intégré ce que c'était et se sont même excusés de m'avoir fait subir tout ça (...) Mais j'essaye de ne pas être un tyran. J'en ris, il faut relativiser."

Bonus

L'association Stop misophonie permet aussi aux patients d'échanger témoignages et solutions concrètes.

(1) Editions Cherche-Midi

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